Me Jean-Yves Dupeux, spécialiste du droit de la presse, invité du débat sur « La presse est-elle encore un 4ème pouvoir ? », s’était exprimé, le 28 septembre à Bordeaux, à propos de la loi Bloche et de l’éventualité de la création d’un Ordre des Journalistes. Apparemment, son point de vue avait pu être mal compris. Il lire la suite

Me Jean-Yves Dupeux, spécialiste du droit de la presse, invité du débat sur « La presse est-elle encore un 4ème pouvoir ? », s’était exprimé, le 28 septembre à Bordeaux, à propos de la loi Bloche et de l’éventualité de la création d’un Ordre des Journalistes. Apparemment, son point de vue avait pu être mal compris. Il le clarifie donc dans le texte ci-dessous à la demande de Marie Christiane Courtioux.

« Jusqu’à il y a une demi douzaine d’années, le seul fait de parler à des journalistes de déontologie passait pour un propos liberticide. Pis encore, la création d’un Ordre des journalistes, comme il existe un Ordre des avocats ou un Ordre des médecins, serait apparu comme étant la fin de la liberté d’expression…

« En réalité, les temps évoluant, les journalistes cherchent un peu à mieux structurer leur métier et à connaître les règles qui les mettent à l’abri des poursuites judiciaires. Celles-ci se sont en effet considérablement accrues et il devient fréquent qu’un magazine connaisse plus de douze actions judiciaires par an ( diffamation, injure, atteinte à la vie privée, atteinte à la présomption d’innocence, incitation à la haine raciale… ).

« Il y a donc aujourd’hui davantage de demandes pour mettre sur pied une déontologie des journalistes. C’est d’ailleurs à cet égard que la récente loi dite « Bloche » ( 4 octobre 2016 ) a prévu que chaque entreprise de presse doit se doter d’une charte de déontologie devant être suivie par tous les journalistes.

« D’aucun présente cette charte de déontologie comme étant dangereuse car elle pourrait servir de justificatif au licenciement d’un journaliste.

« Plus singulière encore est la demande d’un certain nombre de journalistes de créer un Ordre. Je ne sais pas si ceux qui réclament la création d’une telle institution se rendent compte de ce que c’est qu’un Ordre. Il doit en premier lieu rassembler et contrôler tous les professionnels qui exercent le journalisme. C’est déjà une tâche difficile tant l’éventail des formations des journalistes est grand.

« En deuxième lieu, tous les ordres professionnels en France ont une vocation disciplinaire. Cela voudrait dire qu’un Ordre des journalistes serait susceptible, cumulativement avec des poursuites civiles ou pénales à l’encontre d’un journaliste, de prononcer des sanctions disciplinaires à l’encontre de ce journaliste. Ces sanctions disciplinaires pourraient aller jusqu’au retrait définitif de la carte de journaliste. Ces sanctions seraient administrées par un corpus de membres du Conseil de l’Ordre des journalistes dont ceux-ci pourraient ne pas toujours reconnaître la légitimité.

« Il y a donc là un chemin difficile à suivre et je n’en suis personnellement pas partisan.

« Rien, à mon sens, ne peut remplacer une formation des journalistes, suivie, rigoureuse et acceptée par le journaliste et par sa direction. »

 

(photo : Me Dupeux, au centre, chemise blanche)

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