Les jeunes du Club ont organisé une première réunion sur un thème qui concerne tous les nouveaux journalistes qui cherchent un emploi, mais aussi ceux qui travaillent pour plusieurs employeurs « Nous avons ranimé cette année le Club Pigiste, sous forme “junior“, et nous commençons par vos expériences dans la pige. » Jean Berthelot de la lire la suite

Les jeunes du Club ont organisé une première réunion sur un thème qui concerne tous les nouveaux journalistes qui cherchent un emploi, mais aussi ceux qui travaillent pour plusieurs employeurs

« Nous avons ranimé cette année le Club Pigiste, sous forme “junior“, et nous commençons par vos expériences dans la pige. » Jean Berthelot de la Glétais, le président du Club de la Presse, était avec Ariane Puccini, trésorière adjointe et animatrice de la “Tour de Piges“, le 12 décembre au Club face aux étudiants en journalisme et aux pigistes qui forment la structure “jeune“ de l’association. Elle s’est déjà dotée pour cette année d’un président, Clément Bouynet et d’une vice-présidente, Juliette Pierron, et entend proposer « des temps d’échanges, des ateliers, des rencontres, liés aux attentes de celles et ceux qui s’apprêtent à entrer dans la vie professionnelle ». Avec également Elsa Dorey et Laetitia Langella, les pigistes ont reçu depuis plusieurs années un appui régulier, avec un local au deuxième étage, intitulé “la Tour de Piges“ qui leur est réservé.

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Notre président, redevenu lui-même pigiste en 2012, a présenté son expérience. Ancien diplômé de l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA), il y enseigne désormais, tout en travaillant pour douze médias nationaux et régionaux. Ariane Puccini a créé le collectif “Youpress“ qui rassemble 11 journalistes pigistes, de la presse écrite et de la télévision, et qui travaillent ensemble pour un grand nombre de médias. « Il faut présenter tout d’abord ce qu’est un pigiste aujourd’hui, dit-elle, il s’agit d’un salarié qui cotise au régime général, donc il a droit aux congés maladie, maternité, et à la retraite. » Un statut qu’il faut nettement différencier de celui des autres “free-lance“ et d’autres professions, payés en droits d’auteurs, et qui ne bénéficient donc pas des avantages des lois qui couvrent les journalistes salariés. Cela peut occasionner de graves difficultés ensuite, notamment pour la retraite.

Jean Berthelot de la Glétais explique les détails du bulletin de salaire et des diverses cotisations.

« En théorie, note-t-il, nous devons tous recevoir des bulletins de paie, mais certains médias franchissent la ligne rouge. »

Les jeunes posent de nombreuses questions :  « Que faire si on nous paie en retard ? », « Si on n’est pas publié, est-on payé ? ». « Et dans les médias web, comment est-on payé ? »

« La trace d’une commande, explique Ariane Puccini, c’est un mail, selon la jurisprudence. En théorie, ce qui a été commandé doit être payé. A la différence du salarié, il peut y avoir un délai de paiement, parfois après la parution. Mais si ce n’est pas dans le mois suivant la parution, ce n’est pas normal. »

Campagne pour la carte de presse

Un pigiste qui a travaillé pour une grande agence de photo signale qu’il y a vu « des free-lance qui étaient mieux payés que les salariés. Alors quelle est la différence entre des CDD renouvelables et des pigistes ? ».

Ariane Puccini répond  « sont une variable plus facilement ajustable s’il y a une baisse d’activité ».

« Et si un journal s’arrête, ajoute le président, vous pouvez aller aux Prudhommes, car les pigistes ont droit au licenciement. Il y a aussi la rupture conventionnelle, mais il faut trouver un accord. La différence entre les deux est que le licenciement vous est imposé, alors que la R.C. est négociée. »

Un jeune lui demande comment on obtient la carte de presse. « Il faut que 51% de vos revenus proviennent du journalisme. Et le montant minimum doit être égal à 50% du SMIC ».

La Commission nationale de la Carte fait actuellement campagne pour inciter les jeunes à la demander. Entre autres droits, elle permet de bénéficier d’une mutuelle professionnelle.

« En France, l’employeur principal d’un salarié est tenu de payer 50% de la mutuelle. Les pigistes n’y entraient pas, mais une loi récente exige désormais que l’employeur principal (celui qui délivre le plus de piges à un journaliste) soit obligé de payer. »

Ariane Puccini insiste sur le fait « que les jeunes doivent demander la carte, car il y a des avantages non négligeables. Y compris pour les impôts, avec 7.650 euros à retirer car non imposés ».

Le président indique que cette déduction « est destinée à couvrir les frais particuliers de l’exercice professionnel, matériel, hôtels sur les lieux de reportage, habits, ordinateurs, etc... ».

Que se passe-t-il quand les employeurs veulent à toute force employer des pigistes sous droits d’auteurs, ou sur facture en exigeant qu’ils deviennent “auto-entrepreneurs“ ?

« Ce n’est pas une bonne formule, estime Ariane Puccini, car il faut cotiser à la Caisse des Auteurs, et avoir minimum 8.000 euros par an. Mais cela ne se cumule pas avec le statut de salarié, c’est soit l’un soit l’autre. Quand on écrit des livres, on ne peut pas l’éviter, mais alors le travail de journaliste est payé en piges, et les livres en droits d’auteurs. Faites bien préciser, pour le journalisme, “en salaire“. Et si l’on vous répond que l’on ne peut pas vous payer en piges car vous n’êtes pas une entreprise de presse, c’est faux : ils le peuvent aussi. »

En ce qui concerne les factures, Jean Berthelot de la Glétais rappelle que « soit vous devez avoir une entreprise, soit passer par une société de portage salarial, comme par exemple Cap Com, mais il faut savoir que ces sociétés ne permettent pas de garder la carte de presse. Ou alors vous pouvez vous constituer en auto-entreprise, mais alors vous devrez cotiser à côté pour le chômage, la maladie, la retraite. »

Les deux intervenants du Club insisteront, dans la fin du débat, sur les aspects positifs qui s’offrent aux débutants. « Vous êtes jeunes, déclare Ariane Puccini, mais bien formés et totalement adaptés au marché du travail. Vous devez évacuer une rédaction qui paie mal car c’est du temps perdu. Les médias sérieux, en général, paient un salaire ». Faut-il refuser les piges basses ? demande une étudiante. « Cela dépend de l’intérêt du projet, si cela en vaut la peine, et à condition que cela ne dure pas. Par exemple, 15 euros du feuillet, c’est trop peu. »

Il sera encore question de la manière de tisser des liens avec un employeur, de la recherche de correspondances parisiennes, du travail en binôme ou de la rédaction du synopsis et aussi du respect de l’orthographe dans la rédaction… Ariane Puccini conseillera quelques étapes dans la proposition d’un premier sujet : « Chercher un sujet dans le sujet, le décliner en fonction du public, s’interroger sur son actualité, éviter d’avoir les mêmes angles pour des supports concurrents, se souvenir des anniversaires, rechercher des livres sources sur l’événement, lire la presse étrangère si reportage hors de France, lire les rapports officiels (exemple : la Cour des Comptes) ».

« Ne soyez jamais rassasiés, conclura le président du Club,  gardez votre capacité de vous émerveiller. Le jour où on arrête d’être curieux, on est morts. »

PRATIQUE

Le Club junior et la Tour de Piges organisent le 14 janvier un nouvel atelier, cette fois sur les droits des pigistes.

Mardi 14 janvier à 12h30, au Club de la Presse, 9 rue des Capérans à Bordeaux (tram Place de la Bourse) :

Atelier pigetesdroits #4 : bien gérer ses droits Pôle emploi

(Photos Pauline Achard)

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