Dans la collection « Ma vie, mon oeuvre » aux éditions des Dossiers d’Aquitaine, Hervé Mathurin poursuit ses portraits de personnalités politiques de notre région. Après Jacques Respaud, Jean-Louis David, Vincent Maurin et Dominique Ducassou, voici la vice-présidente du Sénat, qui s’est hissée au sommet, depuis des origines modestes et landaises. « – Au nom du Club de lire la suite

Dans la collection « Ma vie, mon oeuvre » aux éditions des Dossiers d’Aquitaine, Hervé Mathurin poursuit ses portraits de personnalités politiques de notre région. Après Jacques Respaud, Jean-Louis David, Vincent Maurin et Dominique Ducassou, voici la vice-présidente du Sénat, qui s’est hissée au sommet, depuis des origines modestes et landaises.

« – Au nom du Club de la presse et de sa présidente Laëtitia Langella, qui regrette de ne pouvoir être là, je remercie Françoise Cartron et Hervé Mathurin de leur venue. » Jean-Marie Dupont a accueilli les invités des Dossiers d’Aquitaine, qui présentaient le nouveau livre de cet éditeur local fort de plus d’une centaine d’ouvrages.

L’ancien directeur de France 3 a rappelé « que la femme politique avait également été vice-présidente du conseil régional » et plusieurs fois élue à diverses fonctions, « une femme passionnée par la culture et l’éducation, et aussi une vraie militante. »

Il revenait à Hervé Mathurin, journaliste à Sud Ouest et déjà auteur de quatre portraits d’hommes politiques de tous bords, de dire pourquoi il avait fait ce choix. « – Cela faisait longtemps que je cherchais à présenter une femme en politique, mais plusieurs avaient refusé, notamment pour des raisons de disponibilité. Et j’ai pensé à Françoise Cartron, que je connaissais de réputation, et qui travaillait au plus haut niveau de la République, le Sénat. Elle était arrivée à la politique par des voies originales, ayant été au départ institutrice. Elle a accepté ma demande, j’étais ravi. Dès le premier rendez-vous, elle m’a raconté son enfance et j’ai compris que j’avais à faire à quelqu’un d’exceptionnel. Nous avons eu un échange plus fort qu’une autobiographie classique.»

De son enfance modeste dans les Landes, où elle connut le drame de perdre son père dans un accident de la route, jusqu’à sa vie professionnelle d’institutrice à Lormont, dans un quartier « sensible », puis de sa carrière politique de militante socialiste, toujours tournée vers la vie des gens, et notamment des femmes, et la vie locale, Françoise Cartron garde une série d’expériences qu’elle décrit avec retenue.

« – Je ne pensais pas, avoue-t-elle, que ma vie méritait un livre ! C’est un parcours non déterminé,  fait de nombreuses occasions. Mais ce qui m’intéressait le plus, c’était la juste place des femmes dans la société. Le second argument était de raconter mon histoire à mes petites-filles, qui ont dévoré le livre et m’ont posé de nombreuses questions. C’est vrai que j’ai eu un très beau parcours, cela casse les schémas par rapport à la mauvaise image des élus. »

Les femmes au Sénat

Elle raconte par exemple sa première campagne à la mairie d’Artigues, alors qu’elle était encore institutrice, face à un notable. « – J’y suis allée parce qu’il n’y aurait pas eu de candidat face à ce maire. Ce n’était pas une question d’étiquette politique, mais un problème de valeurs. »

Elle a été élue, mais le lendemain matin elle s’est retrouvée dans sa classe, car tout ne s’arrête pas d’un coup : « J’ai vu que cela allait être compliqué ! ».

Elle se souvient aussi d’un deuxième moment important de prise de conscience, où elle a également hésité : « C’était au bout de six mois au Conseil régional, où j’étais en charge de l’éducation et de la culture, et où l’on voulait me faire baisser le budget. J’ai répondu que je ne pouvais pas défendre un budget inférieur. Alain Rousset m’a expliqué patiemment toutes les contraintes, mais j’ai eu un moment de doute. »

Ce poids essentiel de l’éducation dans sa vie, elle le tient aussi du drame survenu à son père dans les Landes. Un souvenir marquant explique le rôle de l’enseignement dans ses préoccupations. « – A la mort de mon père, je suis en classe de troisième et le maire local est venu expliquer à ma mère que l’on pouvait me faire embaucher à l’usine. C’était dans une bonne intention, pour nous aider, mais il y avait là aussi un prof de maths de mon collège qui est venu à la maison. Et il a dit à ma mère : on va lui faire passer le concours de l’École Normale, car les études sont payées... »

Françoise Cartron n’a jamais oublié ce coup de pouce du sort, et a voulu que d’autres en bénéficient.

« –Dans les beaux quartiers, les enfants ont moins besoin d’école qu’ailleurs, mais il faut un vrai brassage et une vraie mixité. »

Et justement, la place des femmes a toujours figuré dans ses combats. A André Desforges, son éditeur, qui lui demande de rappeler comment elle est devenue vice-présidente du Sénat, elle répond : «- Je ne pensais jamais être élue, car il y avait beaucoup d’hommes en concurrence. On m’avait dit : on vous prévient, si c’est trois hommes au premier tour, le troisième sera déclassé et on remontera une femme ! Cela me plaisait moyen, être promue par défaut, on a des progrès à faire ! A ma grande surprise, j’ai été élue première devant tous les hommes… Mais c’est vous dire s’il y a encore du chemin pour les femmes. »

Auparavant, elle avait failli être élue députée de la Gironde, mais un jeu de candidatures l’a dirigée vers le Sénat. « –Finalement, cela m’a rendu service de ne pas aller à l’Assemblée nationale. Le travail au Sénat est souvent plus approfondi. » Et de nuancer : « -Je ne peux pas comparer, car je n’ai pas été députée, mais ce que je vis au Sénat me convient très bien. »

« Françoise Cartron, une femme au Sénat », par Hervé Mathurin, Editions Les Dossiers d’Aquitaine, 128 pages, 20 euros.

* Dans la salle du Club, il y avait aussi Alain Vidalies, qui a publié chez le même éditeur « Ministre sous François Hollande », collection « Témoignages vivants ».

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