Journalistes aux avant-postes et journalistes en devenir ont cherché à comprendre comment la profession fait face quand l'actualité du fait divers devient l'urgence. La couverture de cet atelier par un étudiant de l' EFJ Bordeaux, Aurélien Cardot et par l'UCP2F ( Union des Clubs de France et francophones).

Entre choc émotionnel et urgence de terrain, les journalistes locaux doivent composer avec les tensions du fait divers de proximité. Aux Assises du journalisme de Tours, plusieurs professionnels ont partagé les coulisses d’un genre aussi populaire qu’exigeant.

« La presse de proximité, c’est la base de toute information », affirme d’emblée Laurent Brunel, responsable pédagogique à l’ESJ Lille lors de la table-ronde proposée par l’ Union des clubs de la presse de France et francophones.

Meurtre, incendie, disparition, drame familial… Le fait divers est l’un des genres les plus anciens et populaires du journalisme. S’il fascine toujours autant, c’est qu’il touche à ce qu’il y a de plus humain : la tragédie, la peur, l’injustice, parfois la solidarité. Mais derrière l’apparente simplicité de ces récits dramatiques, se cache une pratique exigeante, surtout lorsqu’on la vit au plus près, sur le terrain local.

Ce que le local change

Le fait divers est souvent vu comme un événement inattendu, souvent dramatique, sans lien direct avec les grandes sphères du pouvoir. Mais tous ne se valent pas. Certains marquent plus que d’autres.

Frédéric Thiers, journaliste au Dauphiné Libéré, parle de ces gros faits divers comme des « remueurs d’âmes ». « Il faut avoir vécu des funérailles pour comprendre le poids de ces drames, il faut le vivre avec les gens. » explique-t-il. C’est justement cette proximité avec les habitants qui permet au journaliste local de saisir l’intensité d’un drame, de sentir ce qui résonne profondément dans un village ou un quartier, témoigne notamment Phoebé Humbertjean, journaliste faits divers-justice à la Nouvelle République

Sur le terrain local, le fait divers prend un relief particulier. D’abord parce que les journalistes connaissent les lieux et parfois les personnes impliquées. « La presse de proximité, c’est la base de toute information », affirme Laurent Brunel, responsable pédagogique à l’ESJ Lille. Être localier, c’est être “à la source” : on arrive souvent avant les médias nationaux, on comprend les codes du territoire, on sent ce qui va marquer une communauté.

Sur le terrain local, le fait divers prend un relief particulier. D’abord parce que les journalistes connaissent les lieux et parfois les personnes impliquées. Être localier, c’est être “à la source”, comprendre les codes du territoire et sentir ce qui va marquer une communauté.

Une pratique sous tension

Mais cette proximité a un prix : émotionnel d’abord. « Le fait divers en local, c’est difficile parce que ce sont souvent des gens qu’on connaît », rappelle Laurent Brunel. Isabelle Horlans, journaliste spécialisée justice et faits divers, souligne l’importance de l’empathie : « C’est quelque chose qui nous gagne et ne nous quittera jamais. »

Sur place, les journalistes sont souvent débordés par la scène. Laurent Brunel conseille alors de tout noter, sans hiérarchie immédiate : « Parfois, la scène est si déroutante qu’on ne sait pas quoi faire. Alors on fait tout. » C’est en rédaction que se construit l’histoire, avec recul et discernement.

Mais face à cette pression constante, le soutien psychologique manque cruellement. « C’est bien d’avoir le numéro d’une ou d’un psychologue sur le frigo de la rédaction », glisse M. Brunel à la suite de Marianne Rigaux, responsable pédagogique à Samsa.fr qui prodigue des formations spécifiques sur cette thématique.

Pour se protéger, il faut se préparer à faire face. Comprendre ce à quoi nous allons être confronté, apprendre sur les mécanisme du trauma et de la sidération, et parler aux journalistes aguerris pour savoir comment aborder ces situations.

Un apprentissage nécessaire, qui en dit long sur les difficultés du métier.

Aurélien Cardot, journalisme à l’ EFJ Bordeaux.

Les photos illustrant ces articles sont de Walid Bourouis.

Vu par l’ UCP2F

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