Un journaliste et deux universitaires de renom étaient au club le 8 décembre pour un débat d’importance, après les « couacs » économiques dans de nombreux médias Le second Café-Presse du Club, animé par Laetitia Langella et Marie-Christine Lipani, a permis de faire le point sur un domaine dans lequel l’actualité fixe de plus en plus de lire la suite

Un journaliste et deux universitaires de renom étaient au club le 8 décembre pour un débat d’importance, après les « couacs » économiques dans de nombreux médias

Le second Café-Presse du Club, animé par Laetitia Langella et Marie-Christine Lipani, a permis de faire le point sur un domaine dans lequel l’actualité fixe de plus en plus de rendez-vous : l’économie. Sur le thème    « Le choix des experts économiques dans la presse », Bernard Broustet, ancien chef du service éco de « Sud Ouest », Michel Cabannes, maître de conférence à l’université de Bordeaux et Edwin Le Héron, maître de conférence à l’Institut d’Etudes Politiques ont débattu avec autant de précision que de passion. Ils sont en effet également membres du « Collectif d’économistes atterrés par le statu-quo idéologique suite à la crise de 2007-2008 ».

 

Le choc du numérique

« -La prévision économique, comme celle de la politique, constitue un art bien périlleux » constatait en introduction Marie-Christine Lipani, par ailleurs directrice adjointe de l’IJBA, recommandant de ne pas oublier que si « l’information est un pouvoir, l’info économique en est peut-être la forme la plus concentrée. »

Elle rappelle au passage que son institut de journalisme a ouvert cette année un diplôme universitaire de journalisme économique.

Bernard Broustet, qui fut aussi collaborateur des Echos, estime « avoir connu un âge d’or où le numérique n’était pas encore là et les recettes de publicité plus fortes. Il y avait des moyens. Depuis ils ont fait le choix de continuer le support papier à côté du numérique, alors que La Tribune a fait celui du tout numérique. La presse économique n’échappe pas au ghetto qui marque la presse papier. Et les recettes n’ont pas progressé dans le numérique, au rythme où l’on perd les lecteurs-papier. »

Dans l’Histoire récente, il se souvient « que c’était un combat quotidien, dans tous les journaux, pour que l’économie soit traitée tous les jours. » Ceci dans un domaine parcouru parfois par de fausses nouvelles ou des approximations. « -Par exemple, en 2002-2003 il y eut une espèce de croyance que c’était l’euro qui avait fait redémarrer l’inflation. Or ce n’était pas aussi simple, la hausse des prix n’était pas entièrement due à l’euro. Pour nous journalistes, ce n’était pas facile de montrer cela. »

 Instrumentalisés par les politiques

Les économistes se sont mis à proliférer, notamment dans les émissions d’actualité des télévisions, et la question de leurs références s’est assez vite posée. « – Ils sont accusés d’être des idéologues, remarque Michel Cabannes, mais en réalité ils fournissent une succession d’éclairages particuliers, inspirés de Marx, de Keynes, etc… avec un côté normatif. Et il existe une pression énorme du système. Les économistes sont instrumentalisés par les politiques. On vient nous chercher quand il y a des crises alors que notre rôle est d’éviter les crises. On l’a bien vu après 2008, même si je crois que cette crise a changé des choses. »

A travers cela, le développement d’un mouvement ultralibéral et mondialisé, à l’opposé des partisans de Keynes sur le rôle des Etats crée ce qu’il appelle « une post-réalité, et Trump a été élu sur cela. Je suis inquiet de voir se développer aujourd’hui une presse de post-réalité, et les blogs expriment ces manipulations. »

Pour Edwin Le Héron, « les experts que les médias invitent et les journalistes économiques sont influencés comme nous tous par des idéologies économiques. Jusque dans les années70-80, quand l’économie allait bien, on pensait que les Etats l’avait bien réglée, il y avait une grande confiance dans l’efficacité du système.

Depuis, les thèses néo-libérales, la libéralisation des structures économiques, des marchés, de la concurrence et la limitation de la participation de l’Etat veulent créer un basculement de la société. Et ces théories exercent une influence sur le journalisme économique. »

Alors quelles sont les évolutions à prévoir pour cette spécialité ? « -D’abord, pour Edwin Le Héron,  de s’adresser à une palette plus large de spécialités économiques, et que les journalistes ne disent pas n’importe quoi. »  Bernard Broustet répond en souriant que « quand un journaliste économique dit une c…, il a le retour assez vite ! » Et de citer « les avantages du Web, qui permet de connaître les détails de la vie d’une entreprise, et même si nous sommes parfois victimes de rideaux de fumée, on ne s ‘en sort pas trop mal. »  Il conclut en étant persuadé « que lors de la crise de 2007-2008, on a frôlé la catastrophe, mais que la légitimité de l’information économique s’est imposée. »

 

 

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