Claude Cordier, le premier élu de la CCIJP était au Club, en clôture de nos séances du Printemps, pour répondre aux questions qui se posent sur la carte professionnelle des journalistes. Un échange passionnant qui a montré la nécessité de rappeler régulièrement certains principes immuables « –Les élections à la commission sont en cours jusqu’au 17 lire la suite

Claude Cordier, le premier élu de la CCIJP était au Club, en clôture de nos séances du Printemps, pour répondre aux questions qui se posent sur la carte professionnelle des journalistes. Un échange passionnant qui a montré la nécessité de rappeler régulièrement certains principes immuables

« –Les élections à la commission sont en cours jusqu’au 17 mai, donc nous avons estimé qu’un éclairage national était utile. » Elsa Dorey, responsable du pôle pigistes et vice-présidente du Club, a accueilli Claude Cordier, par ailleurs journaliste à Radio France Lyon, pour présenter les travaux de la Commission de la Carte d’Identité des Journalistes Professionnels (CCIJP) qu’il préside depuis plusieurs années avec dynamisme et efficacité.

« Il y a quatre listes en présence, a précisé celui-ci, le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT Journalistes et Force Ouvrière. La dernière fois, il y a eu besoin d’un second tour car il n’y avait pas de quorum. J’encourage chacun à voter ! »

Mais des questions agitent les journalistes, en particulier les pigistes, notamment les jeunes au Club ces derniers temps : « A quoi sert la carte ? » « Pourquoi est-elle si difficile à obtenir ? » « Faut-il la demander, alors qu’on peut s’en passer pour travailler ? »

Clémence Dellangnol, du pôle pigiste, a animé le débat, en relayant tout d’abord les questions qu’elle reçoit en tant que militante SNJ. « Soit on est sur les bordereaux des entreprises, soit on est pigiste et on remplit des tonnes de papier. En quoi la carte est-elle paritaire, et quelles sont les différentes étapes ? »

Le président de la Commission réagit tout de suite : « Les journalistes ne sont pas forcément au courant, mais il y en a quand même 35.000 qui renouvellent leur demande chaque année. S’ils le font c’est que cette carte a un intérêt, et pas seulement pour les impôts. Nous avons fait une enquête: 85% des journalistes y ont répondu et 82% ont dit s’intéresser aux élections. Alors s’il n’y a que 7.000 votants, c’est qu’il faut faire quelque chose, et c’est pour cela que nous allons dans les régions. »

Une instance paritaire qui marche

Claude Cordier rappelle que la carte a 82 ans, qu’elle compte depuis 1935 d’un côté les patrons de presse et de l’autre les journalistes, à raison de huit titulaires et de huit suppléants de chaque côté, soit 32 membres en tout, avec une équipe de 18 salariés. Des correspondants régionaux reçoivent les dossiers et vérifient leur véracité avant de faire remonter un avis.

« Il n’y a jamais de refus d’une carte par une seule personne, précise le président, si quelqu’un se prononce contre un dossier, ça passe en commission. La personne va devoir justifier son doute, et la commission statue. Sur 35.047 cartes en 2017, il y en a au maximum 1.500 qui passent en commission plénière chaque année. Moins de la moitié sont refusées, et sur ces 700 cartes il y a toujours la possibilité de passer en instance supérieure ».

Pour lui, la commission est l’une des institutions paritaires qui fonctionnent bien. « Alors si certains lui reprochent d’être parfois tatillonne, sachez qu’on l’est autant avec un célèbre journaliste de télévision qu’avec un pigiste à 500 euros par mois. »

Il insiste sur le fait que la carte n’est pas qu’un symbole, mais d’abord un outil de travail. Elle démontre l’appartenance à une profession. Elle est indispensable pour passer les « check points » et les barrages de police. « Le fait qu’elle soit accordée par une instance paritaire, indépendante est assez rare dans le monde. Faut-il nous aligner sur le système anglais où ce sont les entreprises de presse qui la délivrent ? Faut-il des instances où ce seraient les syndicats, ou l’Etat ? Non, et non : il vaut mieux une instance comme la nôtre, paritaire. »

Richard Hecht, élu national des journalistes CFDT, confirme ce propos : « Pourquoi va-t-on aux conférences de presse avec la carte et non pas avec une simple carte d’identité ? C’est parce qu’on y va à titre professionnel. Des confrères nous envient cela sur le plan international. »

Le débat aborde ensuite la situation de blogueurs ou de nouveaux entrepreneurs, y compris parmi les correspondants de la presse régionale, qui n’ont pas la carte mais exercent une activité para-journalistique. « Pourquoi ne pas rendre la carte obligatoire à tous ceux qui travaillent dans un média ? » demande Elsa Dorey.

« La Commission de la Carte est la première à avoir reconnu, dès 1998, des journalistes web, répond Claude Cordier. Les nouveaux métiers ne changent rien à la définition du journalisme : toutes nos discussions le montrent. Ma plus grande crainte pour l’avenir de la carte serait de la voir devenir carte des CDI de l’entreprise. Or il se développe de nouvelles professions à côté de nous. »

Il faut donc faire évoluer la grille des catégories, et Richard Hecht estime « qu’il faut peut-être mener des campagnes collectives, car la presse en ligne veut se faire reconnaître. »

Le président de la Commission conclut en rappelant que « la CCIJP est aussi un formidable observatoire, un baromètre de la profession. » Et il lance un appel, en particulier aux étudiants présents : « Ne laissons pas se développer une sous-profession, une ubérisation de notre métier. »

Jean-Pierre Spirlet

Remerciements

A l’issue du dernier débat, Laetitia Langella, la présidente du Club de la Presse, a adressé le message suivant aux participants :

« Ce Printemps du Club de la Presse de Bordeaux 2018 nous aura permis de nous plonger dans ce Mai 68, moins connu, celui vécu dans les rédactions. Jean-Marie Dupont, Jean-Jacques Cheval et Yves Agnès ont livré des témoignages tour à tour drôles, émouvants, uniques qui nous auront permis de nous interroger sur ce Mai des médias et ses effets sur les 5 décennies qui suivirent. 

Puis, avec Joëlle Dusseau et Pierre Brana, les auteurs de « Mai 68 à Bordeaux » nous sommes retournés sur les barricades, elles aussi moins connues, les barricades bordelaises ! Un ouvrage qui est un édifiant travail de recherches. 

Enfin, Claude Cordier, le Président de la Commission de la carte d’identité des journalistes, a échangé jusqu’à tard avec nous sur l’intérêt de la carte de presse pour les journalistes professionnels. Rencontre, là encore, passionnante !

Nous avons affiché complet pour ce Printemps grâce à vous chers témoins de notre profession souvent malmenée. 

Un grand merci aussi à tous les membres du Club qui ont participé à cette réussite. »

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