Le second débat du Printemps du Club, le 13 avril, posait cette question. Fake news, manipulateur du « clic », la propagande numérique nourrie aux formules et aux  théories du complot s’attaque à notre monde. Comment peut on dans ces conditions informer et être informés ? Quels sont les moyens pour contrer les rumeurs et fausses nouvelles lire la suite

Le second débat du Printemps du Club, le 13 avril, posait cette question. Fake news, manipulateur du « clic », la propagande numérique nourrie aux formules et aux  théories du complot s’attaque à notre monde. Comment peut on dans ces conditions informer et être informés ? Quels sont les moyens pour contrer les rumeurs et fausses nouvelles ?

« Nous, journalistes, préférons parler de désinformation plutôt que de  fake news ». Laetitia Langella, présidente du Club de la Presse, a animé le second débat du Printemps du Club. Il se déroulait à Sud Ouest, avec un accueil de Stéphane Vacchiani, responsable de l’événementiel, après une première rencontre la veille à l’IJBA.

« Plus que jamais nous entendons, notamment dans cette campagne électorale, notait la présidente en introduction, des critiques, voire des insultes à l’encontre des médias. Nous voulons montrer ici le rôle essentiel des journalistes professionnels. »

Les intervenants, qui avaient répondu à l’appel du Club, étaient Benjamin Rosoor, président fondateur de l’agence Web Report et co-fondateur d’Aquinum, Naima Luche, spécialiste de la transition numérique de la presse, Alexandra Tauziac, journaliste à Sud Ouest et Jean Petaux, politologue à Sciences-Po Bordeaux.

« Il faut souligner, notera Alexandra Tauziac, qu’il n’y a pas toujours désinformation, il existe aussi des problèmes de contexte. Et notre région est pour l’instant plutôt à l’abri des fausses informations. »

Même impression générale chez Naima Luche, qui fait des recherches sur les outils du web, et observe « qu’il y a des choses qui relèvent plus de la naïveté que du retard de retrait, par exemple sur Facebook ».

La suppression des « fakes » dès leur apparition pose cependannt problème, et le débat fait très vite apparaître un problème très peu perçu, celui de la manipulation individuelle de chaque internaute par les grands opérateurs qui observent les usagers.

« Aujourd’hui, explique Benjamin Rosoor, Facebook nous enferme dans des bulles d’information, qui font que chacun de nous n’a que le contenu qui nous intéresse ou nous fait plaisir. Par exemple, il y a des images et des messages qui ne vont que dans la « fachosphère ». Dans le système anglo-saxon, la bonne image doit aller à la bonne personne. L’algorithme de Google est de plus en plus perturbant, car l’info doit être pertinente par rapport à vous. »

Il recommande, pour échapper à cela, de quitter Google et de passer par Kwant ou d’autres systèmes libres. A Laetitia Langella qui demande ce qu’un journaliste doit faire pour s’informer sans passer par Facebook ou Google, il répond que « si vous voulez sortir de votre bulle ou de vos « amis », il faut créer des comptes à côté, pour avoir des « amis » différents ».

Dans le sens du poil

Jean Petaux, chercheur à Sciences-Po, estime que « nous sommes dans une situation où la fragilité de l’information se surajoute à la rapidité et au caractère clos. Ce n’est pas parce qu’on observe une affaire que l’on est en mesure d’y répondre. » Naima Luche affirme qu’il y a une prise de conscience chez les journalistes. Elle cite « The Guardian, qui a créé Buster Bubbles, « un dispositif qui casse les cercles cognitifs pour forcer la confrontation qui a disparu à cause des algorithmes, ce qui fait que Google ne donne que les informations qui vont dans le sens du poil. »

Benjamin Rosoor renchérit en remarquant que « sur Facebook la distribution de l’info est très ciblée ». Il se bat « pour un droit à l’oubli, qui existe enfin aujourd’hui grâce à la Cour Européenne de Justice, qui permet de « déréférencer » un article sur Google. » Fabien Pont, médiateur de Sud Ouest, observe « que l’article va quand même rester sur le site d’origine, et certains éditeurs refusent d’enlever la page ». Jean Petaux pose le problème du rapport à l’Histoire : « Nous sommes confrontés à une situation où le temps est complètement contracté. C’est paradoxal, les machines ne donnent pas droit à l’oubli, alors que l’éducation et les sociétés évoluent dans une sorte d’amnésie. Alors les événements qui doivent permettre une compréhension critique de l’instant, y compris de la relativité des choses, tout cela est complètement écrasé. Cela rend bien compliquée l’éducation au sens large. »

Contre la régulation

Marie-Christine Lipani, directrice adjointe de l’IJBA, rappellera le travail important qui est fait pour l’éducation aux médias en milieu scolaire. A Marie-Christiane Courtioux, ancienne rédactrice en chef de RMC, qui demande : « Sommes-nous définitivement captifs de Google et Facebook ? » Benjamin Rosoor répond « que tous les grands réseaux sont vent debout contre toute régulation, notamment de la part de l’Europe, et contre toute régulation des algorithmes. » Il conseille d’aller « sur Kwant, sur DuckDuck Go car on a encore le droit de changer de moteur de recherche. »

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